Les artisans

L'organisation du territoire, les impôts, la monnaie

La province des Alpi Maritimae était placée, du temps de César, sous l'autorité d'un préfet relevant directement du proconsul (César lui-même). La province allait devenir une circonscription militaire en 14 avant J.-C., puis une province militaire en 63 de notre ère. Le préfet allait alors laisser la place à un procurateur. Installé à Cemelenum, Cimiez, cet intendant général disposait des pouvoirs civils et militaires. Il était secondé par un légat et un questeur, qui percevait les impôts collectés par les percepteurs dans les civitates.

Les subdivisions territoriales

Plusieurs civitates composaient à l'origine la province des Alpi Maritimae, dont celle de Cemenelum, Nice, Vintium, Vence Brigomagnus, Briançonnet, Glanates, Glandèves, et leurs territoires respectifs. Plus tard, Senez, Castellane, Embrun entrèrent dans la Province. Chaque civitas était ensuite divisée en pagi, des entités généralement rurales, qui elles mêmes pouvaient comporter plusieurs vici, des bourgs ou des quartiers de ville.

civitas

La civitas

La civitas caractérise à la fois le territoire et son centre urbain. Le chef-lieu administre toutes les terres situées autour de l'agglomération. La ville est le principal facteur de romanisation après la conquête de 14 avant J.-C. C'est par la ville que se diffusent la langue latine et les modes de pensée romains. Dans la cité de province, la politique, la religion, la culture et les autres aspects de la vie sociale forment un ensemble indissociable qui imite le modèle romain.

Le pagus

Le pagus est une subdivision politique et juridique du territoire de la cité. C'est un espace plutôt qu'un lieu, qui peut être comparé à un «canton» moderne. Il regroupe aussi bien des habitations isolées (fermes ou villae) que groupées (hameaux, villages, bourgs). Son découpage a respecté le plus possible les anciens territoires ligures, et même les ethnies, pour faciliter leur intégration au monde romain.

L'administration et la police du pagus étaient confiées à des magistrats, les décurions, dépendants du magistrat du chef-lieu, qui était assisté de conseils locaux.

Le vicus

Le premier sens de vicus est celui de « quartier », au sens de quartier d'une ville, mais c'est aussi celui d'une forme réduite d'urbanisation dans le territoire rural de la cité : c'est une agglomération secondaire, un hameau, un village, un bourg. Un pagus pouvait comporter plusieurs vici.

Les vici se consacraient à des activités artisanales et étaient des lieux de marchés où l'on achetait ou échangeait des marchandises, où l'on venait faire réparer ses outils, ferrer les chevaux. Les habitants des vici pouvaient également servir de main d'oeuvre salariée aux grands domaines proches, qui cultivaient des céréales, des légumes, des fruits, et entretenaient des vignobles et des oliveraies.

Les notables, élus dans ces vici et pagi, étaient chargés de faire respecter le Droit Romain. Les élites parlaient latin, signe de distinction sociale, tandis que le peuple continuait à parler les dialectes ligures. Durant plus de trois siècles, la vie sociale dans ces territoires des Alpes Maritimes, touchés tardivement par les invasions barbares, fut active et pacifique.

administrateur

Le droit romain

Ce droit n'était ni patriarcal ni sacerdotal. Il n'imposait ni l'autorité d'un « clan », ni celle d'un chef guerrier ou religieux. La conquête romaine avait mis à mal la domination des chefs de tribus ligures et dissous le régime des clans. Le droit romain rendait à l'homme son libre arbitre. Il accordait un peu d'indépendance à la femme et aux enfants. Il supprimait l'esclavage pour dettes. Il adoucissait la condition des esclaves. A la souveraineté des castes ou du chef, il substituait celle de l'État, qui ne visait en principe que l'intérêt général.

Mais en cas de faute, le droit romain imposait des peines sévères, qui touchaient plus particulièrement les catégories sociales les moins favorisées.

La population du territoire était composée d'hommes libres, d'affranchis et d'esclaves. Mais les habitants libres des civitas des Alpes Maritimes, s'ils furent tout de suite des contribuables, ne reçurent pas d'emblée le droit de devenir des citoyens romains à part entière.

L'application du droit romain était attaché à une communauté et non un droit individuel. Les habitants régulièrement domiciliés dans la civitas sont des pérégrins (contrairement aux citoyens des colonies ou des municipes, soumises à Rome mais gouvernées par leur propres lois). Certains pérégrins, ainsi que leurs épouses et enfants, pouvaient accéder à la citoyenneté après avoir exercé des fonctions de magistrats municipaux. Avec cet avantage pour l'Empire que seuls quelques notables indigènes devenaient citoyens romains. La société romaine était profondément inégalitaire mais pas fermée en « castes ». L'ascension sociale était possible, mais pour quelques uns seulement. Il faudra attendre un édit de Caracalla, en 212, pour que tous les habitants libres des Alpes Maritimes bénéficient des mêmes droits que les citoyens romains.

Les impôts

percepteur

Les habitants libres des Alpes Maritimes devaient payer l'impôt direct -stipendium- et l'impôt indirect -vectigal-, en monnaie sonnante et trébuchante. Il n'existait pas de traites ou de chèques.

L'impôt était levé à la fois sur le foncier et sur les personnes; l'Etat en échelonnait le paiement en 3 tiers provisionnels.

Des systèmes de réquisitions et de corvées étaient par ailleurs organisés pour le transport du blé et l'acheminement du courrier d'Etat.

L'impôt foncier

Les territoires conquis sur les tribus ligures devenaient le domaine de l'État ager publicus, la propriété du peuple romain. L'Etat pouvait le confisquer en totalité ou en partie. Le plus souvent, il le restituait presque en entier aux propriétaires d'origine, mais à titre de concession gracieuse et révocable, de jouissance de fait -possessio-. La propriété véritable supposait deux conditions : la qualité de citoyen romain pour le propriétaire du terrain, et de terre romaine -ager romanus- pour la propriété.

L'impôt foncier avait pour base le cens, ou recensement des personnes et des propriétés. Le comptage commença en l'an 44 av. J.-C., par des travaux de mensuration et de cartographie dont César confia l'exécution, pour l'Occident, au géomètre Didyme. Ce recensement se prolongea sur un siècle et demi. Il ne fut terminé qu'au II ème siècle après J.-C., sous Trajan.

L'impôt individuel

Il y avait, à côté de l'impôt foncier, un impôt personnel -tributum capitis- fondé sur l'évaluation de la fortune mobilière et dont on ne saurait dire avec certitude s'il s'ajoutait ou non à l'impôt foncier. Les non propriétaires en tout cas y étaient soumis.

La monnaie

monnaie

La monnaie était émise dans des ateliers officiels et frappée sur ordre de l'Empereur. Elle était un moyen d'échange et de commerce, mais aussi un outil de propagande et d'information sur l'empereur du moment, en faisant connaitre son visage.

Il y avait des pièces d'or et d'argent, mais les plus courantes étaient en bronze ou en cuivre.

Les pièces usuelles étaient les deniers, en argent, les sesterces en laiton et les as en cuivre.

Sous l'Empire romain, les monnaies comportaient un portrait de l'empereur ou d'un membre de sa famille sur la face principale (avers) et généralement une divinité ou une allégorie, parfois un monument sur l'autre face (revers). L'inscription de l'avers donnait le nom et les titres (abrégés) du personnage représenté. Sur le revers était souvent frappée l'inscription SC, qui signifiait senatus consultus (avec l'approbation du sénat romain).